Daniel Gautier
France
1936-2018
Obituary:
Daniel Gautier nous a quitté le 8 août 2018, à l’âge 82 ans.
Il avait passé sa thèse de spectroscopie moléculaire dans le laboratoire de Galatry à Besançon et, dans le milieu des années 1960, il était entré au CNET-CRPE. Au début des années 70 il est arrivé à l’Observatoire de Paris à Meudon dans le département solaire (devenu ensuite le DASOP).
Il a ensuite passé deux ans au Goddard Institute for Space Studies (New York) où il a travaillé avec Ichtiaque Rasool, qui lui fait découvrir les potentialités de la recherche planétaire, et il y rencontre aussi Tobias Owen, rencontre qui signe le début d’une amitié faite d’intérêts scientifiques et culturels communs, et qui a duré toute leur vie.
Fondateur du « Groupe Planètes » en 1975 avec entre autres Michel Combes, Thérèse Encrenaz et Catherine de Bergh, il a travaillé au renouvellement de la planétologie française, avec la mise en place de ce qui est devenu le Programme National de Planétologie de l’INSU. Il a dirigé le "Groupe Planètes" à Meudon jusqu'à la fin des années 1970, puis rejoint le LAIR (Laboratoire d’Astronomie Infrarouge), toujours à Meudon, dirigé par Pierre Léna. Il succède à Pierre à la direction du LAIR au début des années 1980, jusqu'à l'insertion du LAIR dans le DESPA (alors dirigé par Michel Combes) vers 1985.
Daniel Gautier a commencé sa carrière de chercheur en étudiant le rayonnement thermique planétaire, notamment par l’inversion de l’équation du transfert radiatif.
Il a déterminé les abondances élémentaires et isotopiques des planètes géantes et a étudié la structure thermique, la composition et l'aéronomie de l'atmosphère de Titan en balayant tout le spectre électromagnétique avec des télescopes au sol.
Daniel a continué à appliquer ces techniques d’observation aux études au sol de l’atmosphère de toutes les planètes géantes et il a en outre étudié la structure interne de Jupiter et de Saturne en utilisant les observations des oscillations planétaires.
La détermination et l’interprétation du rapport D/H à la fois dans les planètes géantes et dans plusieurs comètes constituent l’un des sujets de recherche les plus importants pour lesquels Daniel Gautier a apporté des contributions remarquables à la compréhension de la nature de la nébuleuse protosolaire.
En tant que co-investigateur de l'expérience IRIS des sondes Voyager, il a utilisé toutes les données recueillies au cours des douze années de la mission pour étudier l'abondance de l’hélium dans toutes les planètes géantes et fournir une interprétation globale des observations.
La médaille David Bates 1996 lui est décernée pour ses contributions profondes et variées au rayonnement thermique planétaire, à la composition et à l’aéronomie des atmosphères des planètes géantes et aux oscillations planétaires.
La plus grande aventure scientifique de Daniel Gautier a été la mission Cassini-Huygens.
En 1980, immédiatement après le survol de Titan par Voyager 1, Daniel a compris qu’il fallait absolument explorer le système de Saturne et particulièrement Titan pour mieux comprendre l’histoire de l’ensemble du système solaire et peut-être même de la vie.
Daniel Gautier et Tobias Owen ont été les principaux promoteurs de la mission Cassini: pendant plusieurs années ils ont consacré leurs efforts à convaincre la communauté planétologique internationale et les autorités politiques des deux côtés de l'Atlantique de l'opportunité unique d'explorer en profondeur le système de Saturne et, en particulier, de Titan. Ils ont su fédérer des centaines de scientifiques et d’ingénieurs dans un entreprise qui peut être considérée comme la réalisation de la « dernière cathédrale » dans l’exploration planétaire.
Après l'approbation de la mission, Daniel a été choisi comme scientifique interdisciplinaire de la mission Huygens. Il s’est investi à fond dans ce rôle pendant les neuf ans qui ont précédé le lancement, en participant à la préparation et à l’optimisation des instruments de la mission, et, pendant les sept ans de croisière vers Saturne, collaborant à la définition des différentes phases de l’exploration de ce système.
Le déroulement parfait de la descente de la sonde Huygens dans l’atmosphère de Titan (14 janvier 2005) et les résultats des expériences embarquées, ainsi que les mesures effectuées par la sonde Cassini pendant son exploration pluriannuelle (du 2004-2017) ont été la meilleure récompense pour Daniel et sont, et resteront, un monument à son intelligence, sa vision de la science, ses formidables capacité de travail.
Marcello Fuchignoni, François Raulin, Thérèse Encrenaz